Le mastocytome est le cancer cutané le plus fréquemment diagnostiqué chez le chien. Il s’agit d’une tumeur maligne des mastocytes, cellules appartenant au système immunitaire, notamment responsable de la réponse de type « allergie ». Les mastocytes produisent ainsi l’histamine responsable de la rougeur et de l’œdème lors de réaction allergique.
Quels sont les signes d’appel d’un mastocytome cutané?
Le mastocytome se présente la plupart du temps sous la forme d’une masse, d’un nodule plus ou moins bien délimité. Il est surnommé le « grand imitateur » car il peut prendre toute sorte de forme, et peut ainsi parfois être confondu avec des papillomes (« verrues ») ou des kystes.
Le mastocytome peut parfois démanger, et votre animal peut avoir tendance à plus se gratter dans la zone touchée, parfois jusqu’au sang.
Comment diagnostiquer un mastocytome?
Lors de l’identification de la masse, votre vétérinaire réalisera, en plus de son examen clinique répertoriant toutes les éventuelles autres masses présentes au niveau de la peau et du tissus sous-cutané, une cytoponction à l’aiguille fine, afin d’établir un diagnostic cytologique. Il est indispensable de réaliser cette démarche avant toute intervention chirurgicale, afin de définir la chirurgie la plus adaptée, et donc limiter le risque de traitement incomplet, de récidive, voire de métastases.
Le diagnostic définitif sera toujours confirmé par l’analyse histopathologique de la masse dans son entièreté.
Le bilan d’extension idéal inclut une palpation minutieuse du nœud lymphatique (=ganglion) de la zone où se situe la tumeur, et éventuellement d’autres examens complémentaires comme une échographie de l’abdomen, des radiographies des poumons, une ponction du foie et de la rate, un myélogramme (analyse de la moelle osseuse), et un bilan sanguin et urinaire.
Quel est le traitement du mastocytome cutané chez le chien?
La clef du traitement du mastocytome cutané est le contrôle local adéquat de la maladie. Ceci passe par une chirurgie adaptée, notamment en obtenant des marges de tissus sains autour de la tumeur d’au moins 2 centimètres. La radiothérapie peut parfois être nécessaire lors de tumeur difficilement opérable selon ces principes.
Le comportement biologique (=agressivité) du mastocytome est variable, et peut aller d’une simple maladie localisée à un cancer généralisé. Ce comportement biologique peut être prédit par l’obtention de différents marqueurs (grade histologique, Ki67, index mitotique, mutation c-KIT…).
On défini globalement 2 grands types de mastocytomes :
1/ Les mastocytomes à « bas risque » métastatique, où la chirurgie complète, selon les principes de chirurgie oncologique, est généralement curative.
2/ Les mastocytomes à « haut risque » de métastases, où le traitement local adéquat devra être accompagné d’une chimiothérapie adjuvante à la clinique ou à la maison, afin de limiter le risque de développement des métastases, ou traiter ces dernières lorsqu’elles sont déjà présentes.
Place de la radiothérapie
Sur les mastocytomes non opérables, la radiothérapie externe mégavoltage est une modalité de traitement loco-régional offrant un taux de réponse comparable à la chimiothérapie cytotoxique allant de 44% à 88,5 % en fonction des protocoles. En association avec la prednisolone, un protocole de 4 séances de 8 Gy offre un taux de réponse globale de 88,5% (34,2% de réponse complète) pour une survie sans tumeur de 1031 jours. Une radiothérapie adjuvante à la chirurgie peut être envisagée afin d’obtenir un contrôle local et régional adéquat.
Place de l’électrochimiothérapie
Les mastocytomes cutanés semblent particulièrement bien répondre à cette modalité thérapeutique, avec des taux de réponse complète rapportés allant jusqu’à 80%. Un traitement per-opératoire des marges d’une exérèse marginale, ou un traitement adjuvant à la chirurgie incomplète sont autant d’indications à cette modalité de traitement.
Place du traitement local avec le tiglate de tigilanol
Le tiglate de tigilanol peut être intégrée à la stratégie de contrôle local du mastocytome cutané canin non métastatique, quelle que soit la localisation anatomique, ou, lors de mastocytome sous-cutané localisés sous le coude ou sous le grasset. Un taux de réponse complète de 75% après une première injection est rapporté.
L’injection intra-tumorale ne nécessitant pas d’anesthésie, ce traitement local peut représenter une possibilité de prise en charge des animaux à risque anesthésique (score ASA 3 à 5), par exemple lors de la présence de comorbidité associée (cardiopathie dégénérative, néphropathie chronique…).
Place de la chimiothérapie cytotoxique
La chimiothérapie tient un rôle-clef dans la prise en charge des mastocytomes à haut-risque, notamment dans la perspective de limiter le développement de métastase à distance.
Divers protocoles de chimiothérapie à doses maximales tolérées et métronomiques ont été évalués dans la prise en charge des mastocytomes cutanés et sous-cutanés chez le chien
Des taux de réponse globale de 12% à 65% sont rapportés selon les études et les molécules utilisées.
Le protocole associant vinblastine et prednisolone avec incrément de doses est recommandé en première intention lors de mastocytome cutané non opérable, ou en adjuvant au contrôle local adéquat lors de mastocytome à haut-risque métastatique.
Des protocoles plus intensifs associant vinblastine, lomustine et prednisolone peuvent parfois être nécessaires lors de présence de métastases loco-régionales ou à distance.
Place des inhibiteurs des récepteurs à activité tyrosine kinase
Le masitinib et le tocéranib sont les deux inhibiteurs des récepteurs à activité tyrosine kinase (ITKs) disponibles en oncologie vétérinaire, et ont une homologation dans la prise en charge des mastocytomes cutanés non opérables de grades II et III selon le grading de Patnaik chez le chien.
Le toceranib est associé à un taux de réponse globale de 37,2% à 42,8% (taux de réponse complète : 8-14%). Lors de présence d’une mutation du gène c-KIT, un taux de réponse 2 fois supérieur est observé (69% vs 37%).
Le masitinib est associé à un taux de réponse globale de 50% à 82,1% (taux de réponse complète jusqu’à 38,5%).
Traitements de support
Anti-histamiques anti-H1 et anti-H2 doivent être systématiquement prescrits dès l’identification d’un mastocytome, afin de limiter les effets de l’hyperhistaminémie associée au cancer (vomissement, baisse d’appétit, rash cutané…).
Quel est le pronostic du mastocytome cutané chez le chien?
Le pronostic des mastocytomes dépend grandement de leur type histologique, du type et de la qualité du traitement mis en oeuvre. Alors que les mastocytomes à « bas risque » sont généralement guéris suite au traitement, le pronostic des mastocytomes de « haut risque » reste plus réservé. Cependant, même lors de maladie métastasée, des médianes de survie supérieures à 2 ans sont rapportées. Les avancées très importantes dans le traitement de ce type de cancer ont permis de fortement améliorer la qualité et l’espérance de vie au cours des dernières années.